Dans le domaine de l’image, le récit fait l’objet aujourd’hui d’une importante reconsidération. Ensemble, la photographie et la vidéo forment un terrain critique et l’un des plus beaux laboratoires d’expérimentations narratives qui surviennent actuellement. Sous le thème Explorations narratives, Le Mois de la Photo à Montréal 2007 propose d’examiner ce phénomène dans son ampleur par une trentaine d’expositions solos qui mettront en valeur les différentes manières de repenser les narrativités de l’image.
Ce renouvellement de la narrativité touche à plusieurs aspects de l’image et se manifeste de différentes façons. Si on a longtemps débattu du statut particulier de la réalité en photographie, le recours à la mise en scène – qui augmente avec les possibilités multiples qu’offre la composition numérique, les développements technologiques et la création d’images par ordinateur – contribue de façon importante à remanier ce rapport au réel et à transformer le potentiel
narratif de l’image. Les emprunts au cinéma, aux médias ainsi qu’aux réseaux de communication participent également à cet élargissement des possibilités narratives tout en proposant une réflexion critique sur l’usage et le pouvoir des images. La 10e édition du Mois de la Photo à Montréal veut aussi aborder un phénomène récent et particulier qui consiste à reprendre et à revisiter des modèles narratifs déjà existants, d’où sans doute l’attrait que suscite le cinéma
chez plusieurs artistes. La reprise d’une image, d’un film ou d’une trame narrative engage à la fois la reconsidération de ces modèles et l’émergence de nouvelles expériences. Cette actuelle remise en question attire également l’attention sur la fonction témoignage de la photographie. On ne peut raconter
sans évoquer le côté humain du récit et de l’image, leur relation à la vie, au passé, à la mémoire et à l’histoire.
La reconfiguration de la narrativité est aussi intrinsèquement liée à la question du temps. Plusieurs artistes cherchent à repousser ses limites pour donner forme à des narrations plus complexes, non linéaires et éclatées, procédant par association, montage et démontage, et plus abstraites, explorant le mouvement, la lenteur, la durée du temps réel, la simultanéité temporelle ou spatiale, la répétition ou la circularité. Ces expériences du temps sont plus souples et plus fluides, elles permettent à la narrativité d’exister ailleurs qu’à l’intérieur d’une séquence temporelle chronologique. Elles construisent, ou déconstruisent parfois, des atmosphères de suspense rappelant le cinéma, cherchant à créer des situations d’attente ou d’anticipation qui manipulent la narrativité mais qui finissent aussi par déjouer la perception.
La 10e édition du Mois de la Photo à Montréal souhaite montrer comment les jeux sur la narrativité entraînent des explorations narratives en même temps qu’une remise en question des mécanismes du récit.