Salla Tykkä

Entre photographie et cinéma, le dernier film de Salla Tykkä, ZOO (2006), offre une interprétation remarquable de la notion de suspense cinématographique. Dans un jardin zoologique en Finlande, une femme blonde, rappelant curieusement Kim Novak dans Vertigo (1958) d’Alfred Hitchcock, s’enfonce dans cette étrange nature munie de son appareil photo. Dédoublant et inversant ce regard photographique, la caméra suit les déplacements de la jeune femme dans une ambiance visuelle et sonore propice au suspense. Aussi envoûtantes qu’inquiétantes, ces séquences sont entrecoupées d’images montrant une partie de rugby aquatique particulièrement dangereuse, qui augmente le niveau de tension.

Salla Tykkä
Née à Helsinki, Finlande, en 1973
Vit et travaille à Helsinki
www.sallatykka.com

Au cours des dernières années, Salla Tykkä a réalisé un corpus d’œuvres vidéo où elle explore des états psychologiques vulnérables. Ses quatre films récents – Lasso (2000), Thriller (2001), Cave (2003) et ZOO (2006) – sont des réminiscences de courtes fictions en ce qu’ils représentent des anecdotes énigmatiques et fictives qui existent dans des espaces et des temps indéterminés. Puissante et très chargée sur le plan psychologique, l’utilisation de représentation fragmentée de la mémoire obscurcit la trame narrative, stimulant ainsi l’imagination du spectateur. ZOO aborde l’histoire d’une femme à l’allure sévère, vêtue dans le style des années 1950, qui tente de prendre des photographies dans un zoo non identifié. Après plusieurs tentatives pour cadrer ses sujets, elle pénètre dans une cage et connaît une fin tragique. Les moments de cette narration se mélangent à de brèves scènes d’un match de rugby sous- marin. Même si SallaTykkä ne recourt pas au dialogue ou à la voix hors champ, ses vidéos sont accompagnées de bandes sonores qui ont un impact important sur l’atmosphère des images. Pour ZOO, l’artiste a choisi une oeuvre originale inspirée par le compositeur fétiche d’Alfred Hitchcock, Bernard Herrmann. Il en résulte une oeuvre dramatique, qui plonge les spectateurs dans un espace et un temps fictifs où s’entremêlent le désir et la peur d’interagir avec les autres, tout comme le contrôle qui s’exerce sur eux. Bien que les films de Salla Tykkä suivent une trame narrative, les éléments psychologiques y sont fragmentés, agités et parfois abstraits, comme si les mondes psychologiquement complexes des protagonistes ne pouvaient tout simplement pas être transposés dans un langage cinématographique conventionnel.